Des crimes et des séismes

Dossier : Décoder les programmes
La police prédictive entre science, technique et divination
Par Bilel Benbouzid
Français

Aux États-Unis, la police prédictive s’inscrit dans un projet ancien de réforme de la police qui vise à créer une police de proaction, plus préventive qu’urgentiste, intervenant de son propre chef, sans être mobilisée par l’appel des citoyens. En 2012, lorsque l’entreprise Predpol commercialise une plateforme d’analyse prédictive, téléchargeable sur une simple application, prenant la forme d’un tableau de bord diffusant en temps réel les risques d’occurrence des crimes avec une précision de l’ordre de 200 mètres, le rêve des réformateurs de la police américaine des années 1970 semble se concrétiser dans une machine. Les mathématiciens qui ont créé cette start-up se sont inspirés d’un algorithme mis au point par un sismologue français. Le code source de la plateforme Predpol n’étant pas accessible pour des raisons de secret commercial, nous nous sommes directement adressés au sismologue pour essayer de comprendre les prédictions. En confrontant, d’un côté, un physicien spécialisé en science de la terre et, d’un autre côté, des chercheurs en mathématique appliquée tournés vers le développement de machines prédictives, nous avons rendu visibles les êtres qui font exister l’algorithme et avons porté toute notre attention sur les associations spécifiques dont l’algorithme de Predpol se compose. Analyser les dimensions morales de la prédiction ne consiste pas à étudier tel ou tel usage du machine learning, mais plutôt à se pencher sur les transformations des modalités de la prédiction d’un contexte social à un autre.

Mots-clés

  • algorithme
  • éthique
  • machine learning
  • morale
  • police prédictive
  • quantification
  • sociologie des sciences et des techniques
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