Cet article propose une critique d'un présupposé durable des enquêtes menées sur le rapport des enfants à la télévision, présupposé qui réside dans une vision exagérément homogène de l'enfance, définie fondamentalement comme une période de structuration du psychisme, plaçant de fait l'enfant en apesanteur sociale. On propose de labéliser cette approche comme « enfantisme », en la calquant sur le terme d'ouvriérisme, représentation enchantée du monde ouvrier. L'analyse s'efforce d'expliciter les obstacles, tant épistémologiques que liés aux outils statistiques disponibles, qui expliquent ce biais d'analyse. Elle suggère, à partir de la mobilisation d'une enquête par questionnaire administrée par voie de presse, qu'il est possible, pourvu qu'on en prenne les moyens, de faire ressortir le poids de variables sociologiques classiques (CSP et niveau scolaire des parents en particulier) et d'esquisser une cartographie des rapports différentiels des enfants de divers milieux aux consommations télévisuelles.