Les hommes de la bourse et leurs instruments merveilleux
Le présent article examine le rôle joué par les technologies d’enregistrement et de transmission des cours et par les connaissances financières dans l’organisation des marchés financiers à la fin du 19e siècle. Contrairement à la conviction très répandue que la technologisation du marché a commencé avec l’arrivée de l’ordinateur, cet article démontre que ce processus a commencé dans les années 1860 et s’est poursuivi sans interruption jusqu’à nos jours. Deux cas de technologies explicitement boursières, développées à la même époque à la Bourse de Paris et à celle de New York, sont ici examinés : le pantélégraphe de Caselli et le téléscripteur ou « ticker » de Calahan. Partant d’une analyse des formats cognitifs sous-jacents de ces deux technologies, cet article explore les raisons du triomphe du ticker a sur le pantélégraphe, malgré certains avantages technologiques manifestes de ce dernier. Nous mettons ensuite en évidence les conséquences de cette victoire : le cadre cognitif et la forme organisationnelle du marché boursier ont été considérablement modifiés. Les données sur lesquelles l’auteur base son analyse proviennent de manuels d’investissement d’époque, brochures, articles de journaux, rapports, correspondances de courtiers et journaux personnels d’investisseurs. Il soutient, dans sa conclusion, que les principes de fonctionnement du ticker ont été poursuivis et développés par les écrans d’ordinateurs financiers actuels.