La fabrique discursive de la haine

Dossier
Affects, agitation fasciste et « politique du ressentiment »
Par Olivier Voirol, Émilie Martini
Français

Face à la prolifération des discours de haine en ligne, la réponse la plus courante est celle de la modération des contenus, de la régulation de la parole et de l’élaboration de protocoles numériques visant à repérer et exclure de façon automatisée les énoncés haineux. Le présent texte propose de remonter en amont de ce processus en examinant la manière dont les discours de haine transfigurent des affects réels en leur impulsant une trajectoire spécifique par la fabrication d’un objet de haine. Sur la base d’un corpus de discours d’« agitateurs de la toile » officiant sur Youtube, l’analyse montre que ces discours procèdent à une excitation des affects, un détournement de ces derniers et un évitement du monde objectif. La disparition du monde, doublée de la haine de cibles précises, caractérise cette trajectoire de la haine propre à une « politique du ressentiment » aux antipodes de l’agir démocratique. Le propre de ce dernier est, en effet, de transfigurer les affects en objets discursifs constituant la base d’un monde troublé appelé à devenir l’objet de délibérations au sein de l’espace public. Une autre réponse à la prolifération des discours de haine est, par conséquent, de faire fructifier les conditions matérielles et sociales permettant de « prendre soin » et d’étendre l’espace public d’expérience, d’enquête et de délibération.

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